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Dépénalisation de la vie des affaires

Publié le 20 février 2008 - Mis à jour le 01 juin 2023

Remise au Garde des Sceaux du rapport du groupe de travail présidé par Jean-Marie Coulon

Le groupe de travail présidé par Jean-Marie Coulon, Premier président honoraire de la cour d'appel de Paris, chargé de réfléchir à la dépénalisation de la vie des affaires, a remis mercredi 20 février son rapport à Rachida Dati, Garde des Sceaux, ministre de la Justice. Cette dernière a salué "le travail remarquable" accompli en quatre mois. "Le 4 octobre, lors de l'installation du groupe de travail, je vous avais demandé d'oser, d'être imaginatifs, novateurs. Je crois que vous avez réussi" a-t-elle indiqué, estimant que les trente propositions avancées sont "innovantes, modernes et équilibrées".

Le groupe de travail sur la dépénalisation de la vie des affaires a souhaité reconsidérer le droit pénal des affaires de manière cohérente pour le rendre plus efficace. En effet, il ne s'agit pas d'un droit autonome. Son examen requiert de s'intéresser aux règles de droit pénal général et de procédure pénale. Sa dépénalisation doit s'articuler autour de ses multiples composants, comme le droit boursier, le droit des sociétés, le droit de la consommation ou le droit de la concurrence. Le rapport Coulon a donc appuyé ses travaux sur des critères précis englobant de multiples paramètres (exigences économiques, impératifs internationaux...).

Selon le rapport, la dépénalisation peut consister en un processus de dépénalisation « sèche », quand cela s'avère nécessaire, mais surtout en un mécanisme de clarification de la répression pénale (redéfinir les infractions, revaloriser la justice civile, réduire le temps pénal en réévaluant les délais de prescriptions...)

Les propositions du groupe de travail s'articulent autour de trois thèmes :

Tout d'abord, le rapport Coulon propose de rénover le champ pénal. La désuétude de certaines infractions et le concours de certaines qualifications pénales exigent la suppression de certaines d'entre elles. « Le premier volet de la dépénalisation consiste à réduire l'espace pénal, en supprimant des infractions, en limitant le périmètre des incriminations, ou en réduisant les pénalités encourues » est-il précisé dans le rapport. Par exemple, lorsqu'un dirigeant de SARL ou de SA ne réunit pas une assemblée générale, il encourt 6 mois d'emprisonnement et 9 000 euros d'amende. Afin de redonner confiance aux acteurs de la vie économique, le rapport propose, dans ce cas, de réduire le risque à une injonction de faire sous astreinte.

Le groupe de travail évoque ensuite la mise en place de mécanismes de régulation. La reconfiguration de la justice pénale passe par une harmonisation cohérente des peines appliquées à la vie des affaires. Il est proposé, par exemple, d'augmenter le délai de la peine d'emprisonnement pour le délit d'initié, à trois ans au lieu de deux. Le rapport suggère également de substituer au droit pénal des dispositifs administratifs, civils ou des modes alternatifs aux poursuites. Il est enfin envisagé de supprimer le cumul entre les sanctions pénales et les sanctions du Conseil de la Concurrence ou de l'Autorité des Marchés financiers, pour une meilleure articulation entre ces institutions et le droit pénal des affaires.

Le rapport Coulon évoque enfin le développement de réponses effectives aux comportements frauduleux dans le monde des affaires. Le groupe de travail propose la modification des règles de prescription. En effet, il est envisagé, pour toutes les infractions sauf disposition contraire, un délai de prescription fixe mais en contrepartie plus long. Ainsi, les délais seraient de 15 ans pour les crimes au lieu de 10, 7 ans pour les délits punis de 3 ans d'emprisonnement ou plus et 5 ans pour les autres. La lutte contre l'instrumentalisation du droit pénal passe par une revalorisation de la voie civile. Les travaux souhaitent un encadrement plus précis de la constitution de partie civile et une introduction possible en droit français de l'action de groupe. Le rapport ajoute, pour finir, vouloir une amélioration des règles relatives à la responsabilité des personnes morales.
« Il ne s'agit pas de dépénaliser mais de mieux pénaliser. Il ne s'agit pas de déresponsabiliser mais d'anticiper les responsabilités » conclut le rapport Coulon.
« Les propositions faites trouveront leur traduction dans un projet de loi et une politique pénale cohérente » a conclu le Garde des Sceaux.


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