Le pôle national des crimes sériels ou non élucidés

Publié le 09 octobre 2025 - Mis à jour le 28 octobre 2025

Le pôle national des crimes sériels ou non élucidés, souvent appelé pôle « cold cases », traite les affaires criminelles sérielles ou non élucidées présentant une certaine complexité. Sa raison d’être : faire émerger la vérité, lutter contre l’impunité des auteurs des crimes les plus graves, apporter des réponses aux victimes et à leurs proches.

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Le pôle national des crimes sériels ou non élucidés (PCSNE) a été créé en mars 2022 au sein du tribunal judiciaire de Nanterre. Découvrez la genèse, les missions et les méthodes de travail de cette juridiction unique au monde.

Pourquoi le pôle a-t-il été créé ?

Le pôle dédié aux crimes sériels ou non élucidés (PCSNE), prévu par la loi pour la confiance dans l’institution judiciaire du 22 décembre 2021, a été créé le 1er mars 2022.

La naissance de cette juridiction spécialisée est issue du rapport du groupe de travail sur les « cold cases » présidé par le procureur général Jacques Dallest et remis au garde des Sceaux en mars 2021. Ainsi le PCSNE a-t-il été conçu pour :

  • regrouper et centraliser des procédures pour favoriser le recoupement de faits criminels ;
  • spécialiser des magistrats, pleinement dédiés à ces dossiers ;
  • mobiliser des moyens d’enquête spécifiques ;
  • nouer des contacts internationaux ;
  • constituer une mémoire criminelle.

Quelles sont les missions du pôle ?

Le pôle des crimes sériels ou non élucidés a pour missions d’identifier des affaires criminelles complexes, de se saisir de dossiers criminels pour lesquels son expertise est susceptible de permettre leur élucidation et d’éviter que ces dossiers, parfois anciens, ne tombent dans l’oubli.

Autre mission du pôle : construire une mémoire criminelle nationale, c’est-à-dire rassembler l’ensemble des informations relatives aux affaires non élucidées. Cette mémoire criminelle a pour but de favoriser les recoupements avec d’autres dossiers, de faciliter leur résolution et de lutter contre la sérialité.

Pour quel type d’affaires criminelles le pôle est-il compétent ?

Le pôle des crimes sériels ou non élucidés bénéficie d’une compétence concurrente à celle des autres juridictions. Le pôle n’a pas vocation à traiter judiciairement toutes les procédures criminelles non élucidées ou ayant un caractère sériel.

La compétence territoriale du pôle est certes nationale puisqu’il peut se saisir de procédures initiées par d’autres juridictions, mais elle demeure encadrée.

Le PCSNE est ainsi compétent pour les crimes d’assassinat, de meurtre, d’empoisonnement, d’actes de torture et de barbarie, de viol et d’enlèvement ou séquestration, ainsi que pour les crimes et les délits connexes à ces crimes, et lorsque l’une au moins des deux conditions ci-après est remplie et que les investigations présentent une certaine complexité :

  • ces crimes ont été commis ou sont susceptibles d'avoir été commis de manière répétée à des dates différentes par une même personne à l'encontre de différentes victimes (crimes sériels) ;
  • leur auteur n'a pu être identifié 18 mois après la commission des faits (crimes non élucidés).

D’autres critères sont également pris en compte :

  • la dimension nationale ou internationale des faits ;
  • la perspective d’investigations nécessitant un haut niveau de technicité et d’expertise ;

La saisine du pôle n’est pas envisagée :

  • en cas de crime commis dans un cadre familial ;
  • s’agissant de crime commis en bande organisée, lié à un contexte de criminalité organisée ou en lien avec des règlements de comptes ;
  • en cas d’auteur identifié mais non interpellé ;
  • lorsque des personnes sont déjà mises en examen, sauf investigations complexes à poursuivre.

Quelle est l’origine des affaires portées à la connaissance du pôle ?

Le parquet du pôle des crimes sériels ou non élucidés bénéficie d’une multitude de sources d’identification des affaires criminelles :

  • les juridictions ;
  • l’Office central pour la répression des violences aux personnes (OCRVP) ;
  • la Division des affaires non élucidées de la gendarmerie (DiANE) ;
  • les avocats ;
  • les victimes ou parties civiles ;
  • les associations ;
  • les médias, en particulier la presse quotidienne régionale.

Le parquet du PCSNE mène également ses propres investigations pour identifier des procédures criminelles susceptibles de relever de sa compétence.

Contacter le pôle des crimes sériels ou non élucidés

Vous souhaitez transmettre une information au pôle ou le solliciter concernant une affaire non élucidée ? Vous pouvez écrire à parquet.coldcase.tj-nanterre@justice.fr. Les informations transmises seront traitées de manière confidentielle et il est possible de témoigner de manière anonyme.

Comment le pôle des crimes sériels ou non élucidés travaille-t-il ?

Les magistrats instructeurs et les greffiers du pôle des crimes sériels ou non élucidés se consacrent uniquement à ces affaires qui, en raison de leur complexité, exigent un haut niveau de technicité.

Avant même de se saisir, le parquet du pôle effectue une analyse approfondie de l’affaire portée à sa connaissance : cela lui permet d’appréhender l’ensemble des éléments, les pistes d’enquête déjà explorées et celles qui pourraient l’être… Cette analyse prend en compte les avancées scientifiques les plus récentes, notamment en matière génétique, qui pourraient permettre une nouvelle exploitation des scellés par exemple.

Un nouvel outil procédural a accompagné la création du pôle : le parcours criminel. En temps habituel, l’enquête menée se déroule à partir d’un fait. Grâce au parcours criminel, le PCSNE peut enquêter sur des personnes mises en cause ou condamnées pour des infractions éligibles à la compétence du pôle et retracer tout leur parcours de vie : situation personnelle, professionnelle, déplacements géographiques… Cet outil, que seul le pôle peut utiliser, permet d’identifier des faits en lien avec ce parcours et de combattre la sérialité.

Le pôle est en capacité de faire le lien entre des procédures complexes disséminées sur l’ensemble du territoire. Il est également un point de contact essentiel pour l’entraide judiciaire européenne et internationale.

Les membres du PCSNE développent leurs compétences et leur technicité pour répondre à la complexité des affaires et s’appuient sur le savoir-faire de nombreux partenaires avec lesquels ils travaillent en étroite collaboration : services enquêteurs spécialisés (OCRVP, DiANE, brigade criminelle de Paris…), laboratoires d’analyse, experts scientifiques, Interpol, Eurojust…

Le pôle attache une importance particulière à l’accompagnement des victimes et de leurs proches, qui peuvent échanger librement avec les magistrats du parquet ou les magistrats instructeurs. Un espace a été spécialement aménagé pour permettre des conditions d’accueil adaptées.

« En quête d’indices » : un dispositif d’appel à témoins innovant

Un dispositif d’appel à témoins, « En quête d’indices », a été lancé en avril 2024. Cet outil, qui est à la disposition du pôle des crimes sériels ou non élucidés, a pour objectif de sensibiliser le public à certains dossiers anciens pour recueillir de nouveaux éléments de preuve, de nouveaux témoignages ou des témoignages actualisés. Les appels à témoins sont des actes d’enquête décidés par le procureur de la République du PCSNE (s’il s’agit d’une enquête préliminaire) ou le magistrat instructeur (si une information judiciaire a été ouverte).

Ces appels à témoins prennent la forme de courtes vidéos retraçant les faits. Issus d’un partenariat entre les ministères de la Justice et de l’Intérieur, ils sont diffusés sur le site du ministère de l’Intérieur et relayés sur les réseaux sociaux des deux ministères.

Les magistrats du PCSNE, en concertation avec les services d’enquête, sélectionnent les dossiers pouvant faire l’objet d’un appel à témoins « En quête d’indices ». Les informations recueillies grâce aux appels à témoins sont analysées et exploitées par les enquêteurs des services spécialisés de la police nationale et de la gendarmerie nationale.

Toute information, tout souvenir, même incertain, peut aider à faire avancer ces enquêtes.

Quel est le bilan du pôle trois ans après sa création ?

Au 17 mars 2025, trois ans après la création du pôle des crimes sériels ou non élucidés, 434 procédures ont été identifiées ou portées à sa connaissance.

Après analyse de chaque dossier, le pôle est saisi de 121 procédures :

  • 101 saisines de l’instruction, dont 11 parcours criminels ;
  • 20 affaires en enquête préliminaire, dont deux parcours criminels.

Quatorze dossiers ont connu une avancée significative, 12 personnes ont été mises en examen et une personne a été jugée.

Concernant la nature des infractions des affaires traitées par le pôle :

  • 69 % d’entre elles sont des homicides ;
  • 21 % sont des enlèvements ;
  • 10 % sont des viols.