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Festivals du film judiciaire : pleins feux sur la justice

Publié le 19 septembre 2025

Toute l’année, à travers la France, des festivals du film judiciaire sont organisés par les juridictions. Ces événements permettent à la Justice de mieux se faire connaître du grand public, notamment des jeunes.

Photo d'un tapis rouge sur un trottoir, de nuit, éclairé par une lumière très crue
Rendez-vous dans les salles de cinéma pour découvrir la justice.

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Ils sont moins connus que les festivals de Cannes, de Deauville ou de l’Alpe d’Huez mais leur nombre et leur succès ne font que s’accroître. « Ils », ce sont les festivals du film judiciaire. Ces événements fleurissent toute l’année à l’initiative d’un conseil départemental de l’accès au droit (CDAD) et d’un tribunal judiciaire. Pour y parvenir, les organisateurs nouent des partenariats avec l’Éducation nationale, les barreaux d’avocats, la police, des facultés de droit, des associations (de cinéphiles, d’aide aux victimes…), des salles de cinéma…

La justice, source de fantasmes

D’un festival à l’autre, le concept est souvent le même. Sur quelques jours, des projections de films sont proposées à des collégiens et des lycéens en journée, au grand public le soir. Les œuvres peuvent être des fictions ou des documentaires, récentes ou non, françaises ou étrangères : « Borgo », « Je verrai toujours vos visages », « La Tête haute », « Le Brio », « Omar m’a tuer », « La Nuit du 12 », « Une intime conviction », « Un Triomphe », « Erin Brockovich », « Le Fil », « Juré n°2 », « Black Box Diaries », « 1:54 », « Stups »… Le choix est vaste ! Et la programmation attire souvent le public. « La justice est un monde qu’il ne connaît pas, rarement côtoyé ou à des occasions exceptionnelles. Il suscite des fantasmes, notamment du côté de la justice pénale. Il y a également un attrait pour les grandes affaires judiciaires qui défraient la chronique », analyse Simon Lanes, président du tribunal judiciaire d’Alès, qui organise son premier festival, entièrement gratuit, du 23 au 25 septembre 2025.

« La justice n’est pas assez visible. Le cinéma est un moyen ludique de sensibiliser le public à l’existence d’une institution qui fonctionne. »

Simon Lanes, président du tribunal d'Alès

Dans la lumière des projecteurs

Ici, pas de compétition, pas de palme d’or. Le but est avant tout éducatif. « L’essentiel est que les projections fassent salles combles ! », déclare Simon Lanes. Selon le président du tribunal, « la justice n’est pas assez visible. Le cinéma est un moyen ludique de sensibiliser le public à l’existence d’une institution qui fonctionne ». « Beaucoup de festivaliers ont découvert la justice par ce biais-là. Cela permet de cibler un nouveau public en dehors des conférences et d’aborder des problématiques actuelles », partage Isabelle Ledemeney, coordinatrice du CDAD de la Mayenne, dont le festival existe depuis 2009. Les films sélectionnés portent sur des thèmes et des traitements très divers : une audience pénale, une enquête policière, le milieu pénitentiaire, la présomption d’innocence, la justice des mineurs, une profession judiciaire, les alternatives à l’incarcération, les droits et libertés…

« L’événement permet d’appréhender le travail des professionnels : juge, avocat, conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation, éducateur, greffier…  »

Isabelle Ledemeney, coordinatrice du CDAD de la Mayenne

Combattre les idées reçues

La plupart du temps, les séances sont suivies de ciné-débats auxquels sont conviés des professionnels de la justice, des acteurs du monde associatif, parfois aussi des membres de l’équipe du film. « Cela permet de donner une idée plus concrète et réelle du système judiciaire français, de corriger les idées reçues véhiculées par les séries américaines », déclare Stéphanie Vernet, secrétaire générale du CDAD des Hauts-de-Seine. Ce conseil départemental de l’accès au droit organise un festival du film judiciaire réservé aux collégiens et lycéens du département en mars-avril depuis une quinzaine d’années. En 2025, près de 1 800 élèves issus de 17 lycées et de six collèges ont ainsi participé et découvert le fonctionnement de la justice. De quoi vouloir embrasser ensuite une carrière dans le droit ? « L’événement permet d’appréhender le travail des professionnels : juge, avocat, conseiller pénitentiaire d’insertion et de probation, éducateur, surveillant, greffier… », se félicite Isabelle Ledemeney. La 16e édition du festival du film judiciaire de Laval aura lieu du 12 au 16 novembre 2025. Dix films seront projetés sur les cinq jours. À plus long terme, le CDAD aimerait élargir la manifestation à l’échelle du département. En 2024, elle avait attiré environ 2 000 personnes.

« Avec le festival du film judiciaire, nous approfondissons vraiment nos relations avec l’Éducation nationale. »

Estelle Jond-Necand, présidente du tribunal judiciaire de Chartres

Justice et Éducation nationale, main dans la main

En général, les festivals s’inscrivent dans un projet pédagogique plus large. Au cours de l’année, des élèves peuvent assister à une audience au tribunal, participer à des concours d’éloquence, voir une reconstitution de procès ou rencontrer des professionnels du droit dans leur classe. Autant d’actions qui permettent aux différents partenaires qui travaillent main dans la main de créer du lien. « Avec le festival du film judiciaire, nous approfondissons vraiment nos relations avec l’Éducation nationale. Ainsi, cette année, pour la Nuit du droit, nous réservons des créneaux de notre escape game à des élèves de terminale option droit et grands enjeux du monde contemporain. Nous n’aurions pas fait cela sans le festival », assure Estelle Jond-Necand, présidente du tribunal judiciaire de Chartres. En 2026, la juridiction organise la cinquième édition de son événement cinématographique. Très préparé en amont avec les enseignants, celui-ci est destiné uniquement à des jeunes de 4e, dont la justice fait partie du programme scolaire. « Nous sommes en train de travailler à l’intégration de cette expérience dans le Passeport Educdroit », un dispositif d’éducation au droit et à la citoyenneté élaboré par les ministères de la Justice et de l’Éducation nationale.

Focus sur la Mission cinéma du ministère de la Justice

Chaque année, près de 70 productions cinéma ou télévision sont tournées dans des lieux de justice. Au ministère, une équipe spéciale, la « Mission cinéma » accompagne et conseille les professionnels dans leur projet de fiction. Elle peut les aider à rechercher des décors, peaufiner le scénario, réaliser des immersions dans les établissements… Ce qui apporte authenticité et réalisme aux projets. Parmi les œuvres accompagnées figurent ainsi « Le Fil » de Daniel Auteuil, « Monte Cristo » d’Alexandre de La Patellière et Matthieu Delaporte, « Anatomie d’une chute » de Justine Triet (2023) ou encore, côté séries, « Lupin » (Netflix), « 37 secondes » (Arte) et « Engrenages » (Canal +).


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