[Archives] Nouveau programme immobilier pénitentiaire - Saint Jean d’Angély

Publié le 05 mai 2011

Discours de Michel Mercier, garde des Sceaux, ministre de la Justice et des Libertés

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Monsieur le député, et président du Conseil général, cher Dominique Bussereau,

Madame la députée,

Monsieur le Préfet,

Madame et messieurs les chefs de cour et de juridiction,

Monsieur le maire,

Mesdames et messieurs les élus,

Mesdames et messieurs,

Mesdames, Messieurs,

Je vous remercie de m’accueillir en Charente-Maritime, alors que la commune de Saint-Jean d’Angély a été choisie pour l’implantation d’un nouvel établissement pénitentiaire. Ce choix s’est porté sur votre commune en raison, évidemment, de la qualité de votre projet et des garanties que vous avez su apporter : en effet, l’implantation d’une prison sur le territoire d’une commune répond à un véritable engagement – le vôtre Monsieur le maire est assurément sans faille.

L’implantation d’une prison sur le territoire d’une commune est un choix républicain qui demande de la détermination, et du courage aussi. Et je veux vous dire toute ma confiance, à Dominique Bussereau aussi, car je sais, Monsieur le député et M. le président du Conseil général, que vous avez été et que vous continuerez à être un soutien précieux pour la réussite du projet. Je tiens à remercier également tous les autres élus qui se sont impliqués, le préfet, les magistrats et l’Agence publique pour l’immobilier de la Justice (APIJ).

L’enthousiasme qui règne ici autour de ce projet s’est manifesté jusqu’à Paris et il est sain que des élus et leur population soient prêts à s’engager sur des projets d’intérêt général de cette nature, qui vont, bien sûr participer au développement du territoire, mais surtout s’inscrire dans une logique d’équilibre au profit de tous.

Ce nouvel établissement s’inscrit dans le programme plus large du ministère de la Justice pour la modernisation de notre parc pénitentiaire, dont je dévoilerai dans quelques instants les grandes lignes.

Je voudrais d’abord rappeler que depuis vingt ans, l’Etat s’est engagé dans une rénovation sans précédent des établissements pénitentiaires, avec une accélération très nette ces dernières années, notamment depuis l’adoption de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009.

Par cette loi, la France s’est dotée de nouvelles règles plus protectrices des droits des détenus et porteuses d’amélioration pour le travail des personnels.

Le ministère de la Justice s’est très fortement impliqué pour que nos établissements pénitentiaires soient en mesure de les appliquer – chacun a conscience, et je veux dire mon engagement sur ce point, que ces règles ne peuvent prendre leur consistance sans les infrastructures adaptées. C’est la raison pour laquelle, le gouvernement a mis l’ouverture de places nouvelles, la réhabilitation ou la fermeture des établissements vétustes et la modernisation de nos infrastructures pénitentiaires au cœur des priorités de son action.

I.Alors que le troisième plan pour l’immobilier pénitentiaire s’achève en 2012, nous nous engageons dès à présent dans un nouveau programme pour poursuivre la rénovation du parc pénitentiaire : si bien qu’à l’horizon 2018, la moitié de nos établissements aura moins de 30 ans.

La modernisation de nos prisons est essentielle, faute d’établissements adaptés, nous ne pourrons atteindre l’objectif majeur de prévention de la récidive qui doit être au cœur du système pénitentiaire.

La loi pénitentiaire l’a très clairement énoncé, c’est en garantissant le maintien des liens familiaux, c’est en développant la formation, le travail, c’est en permettant au détenu d’accéder aux soins, que nous donnerons toute ses chances de réussite à notre politique d’insertion. L’isolement, le manque d’activité sont en effet des freins majeurs à la réinsertion et au maintien des liens sociaux – favorisant les risques de récidive.

Nous devons garantir aux détenus une détention respectueuse de leur dignité. Nous devons aussi permettre aux personnels pénitentiaires d’accomplir leurs missions, souvent délicates, dans les meilleures conditions. C’est l’engagement que nous avons pris pour le respect des règles pénitentiaires européennes, mais c’est aussi notre engagement pour que le temps de l’incarcération soit un temps utile pour la construction d’un projet de sortie.

II.Les investissements déployés par le ministère de la justice sur l’ensemble du territoire permettent de traduire nos objectifs dans les faits. Mais tous ses efforts portent pleinement leur fruit grâce à l’implication de l’ensemble des acteurs du terrain ; nous avons su créer des synergies, notamment avec l’appui des élus locaux, des associations…, et donner ainsi vie à une politique dynamique de réinsertion – les associations sont un soutien indispensable pour la formation, le développement du travail d’intérêt général n’est possible qu’avec l’implication des élus.

Je veux souligner à quel point le nouveau plan immobilier pénitentiaire poursuit cette démarche commune : il a pu être conçu avec beaucoup d’intelligence grâce à un très fort engagement des élus locaux. La Charente-Maritime en constitue un parfait exemple : pas moins de 5 projets ont vu le jour dans votre département - tous de qualité et répondant aux caractéristiques techniques nécessaires. Certes, le maintien de Saint Martin de Ré a pesé dans le choix de Saint-Jean d’Angély, mais pas seulement ; la très forte implication des élus a constitué un élément déterminant.

Je me réjouis que votre projet ait été retenu, car en choisissant votre commune, nous œuvrons aussi pour l’aménagement du territoire en implantant un service public moderne et essentiel dans une zone peu urbanisée.

III.Le nouveau programme poursuit donc l’action de rénovation de l’immobilier pénitentiaire, mais j’ai souhaité qu’il nous permette aussi de franchir un pas supplémentaire pour lutter contre la récidive, avec la création de nouveaux « établissements à réinsertion active » (ERA).

1. Je suis convaincu, en effet, qu’il nous faut en finir avec une trop grande standardisation des établissements : qui appliquent le même dispositif de sécurité, très lourd (double mur d’enceinte, miradors, filins anti-hélicoptère), à tous les détenus, alors qu’on le sait bien nous avons dans nos prisons des profils très différents.

Je propose donc que les détenus purgeant de courtes peines ou manifestant une forte volonté de réinsertion soient affectés dans ces nouveaux ERA. Les établissements existants continueront à accueillir les profils classiques, et les condamnés les plus dangereux seront toujours détenus en maison centrale.

Les ERA reposent sur une sécurité plus légère et une autonomie plus grande du détenu – facilitée par une circulation et un accès aux activités plus libres que dans le régime classique.

2. Il nous faut mener dans ces établissements une action volontariste pour rompre avec l’oisiveté et le cliché du « 22 heures sur 24 » en cellule : mon objectif est celui de cinq heures d’activité par jour et par détenu.

La loi pénitentiaire l’avait érigé en obligation pour le détenu : « toute personne condamnée est tenue d'exercer au moins l'une des activités qui lui est proposée » ; encore faut-il que les établissements soit en mesure de fournir cette activité.

Le nouveau programme prévoit donc de multiplier les lieux d’activités, en quadruplant la surface des zones d’activité mais en développant aussi des espaces dédiés au sein des hébergements.

3. Ces établissements doivent être des lieux de reconstruction, qui favorisent le maintien de liens sociaux pour le détenu.

Nous devons impérativement corriger les effets négatifs du système pénitentiaire actuel, qui engendre trop souvent un fort sentiment d’isolement. La présence humaine devra être importante, car autant que les liens avec l’extérieur, les échanges entre les surveillants et les détenus sont un facteur déterminant de la socialisation.

Grâce à l’action volontariste et continue de tous les acteurs publics, de tous les acteurs locaux, notre système pénitentiaire se modernise. Un Etat républicain trouve ses fondements dans un ensemble de valeurs essentielles, parmi lesquelles la dignité humaine doit avoir toute sa place : lutter contre la surpopulation carcérale, favoriser la réinsertion des détenu sont des actions essentielles pour y parvenir.

Seul le prononcé fait foi