[Archives] Ecole nationale de l'Administration pénitentiaire - Agen

Publié le 27 mai 2010

Discours de Mme Alliot-Marie, ministre d'Etat, garde des Sceaux, ministre de la justice et des libertés

Temps de lecture :

5 minutes

Madame le Directeur,

Monsieur le Directeur Général,

Mesdames, Mesdemoiselles, Messieurs,

 

Ce 27 mai 2010 est pour vous un grand jour. Il restera gravé dans vos mémoires et dans vos cœurs.

Aujourd'hui, après 8 mois de formation, vous recevez les insignes de surveillant pénitentiaire.

Vous avez choisi un métier difficile, passionnant, qui vous place au cœur des missions de l'administration pénitentiaire : protéger la société, sanctionner les crimes et délits, préparer les détenus à la réinsertion dans la société qu'ils ont vocation à retrouver. Vous avez fait le choix de mettre votre énergie, votre courage, votre détermination, au service de la Justice, au service des Français.

Je vous en félicite. Je partage avec vous et vos familles votre émotion, votre fierté et votre joie.

 

Mesdames et Messieurs,

Devenir surveillant pénitentiaire, c'est plus qu'un choix professionnel.

Vous rejoignez la troisième force de sécurité de notre pays. C'est un honneur. C'est une responsabilité.

La Justice comptera sur votre professionnalisme et votre loyauté.

Vous ferez preuve d'autorité. Une autorité ferme et sereine. Une autorité fondée sur le respect de la loi. Une autorité guidée par le sens du devoir.

Vous ferez preuve de responsabilité. Votre mission sera parfois difficile. Vous l'exercerez avec courage, sang-froid, et détermination. La confiance en vos supérieurs et la solidarité avec vos collègues vous seront indispensables.

Vous ferez preuve d'humanité. La prévention de la récidive est au cœur de vos missions. Vous serez, sur le terrain, le premier acteur de cet engagement pour la protection des Français. Vous accomplirez vos missions avec la certitude que tout individu peut s'amender, se réformer, se réinsérer dans la société. Pour cela, vous veillerez à préserver la dignité des conditions de détention. Vous ferez preuve d'écoute et de sens du dialogue quand la situation le justifiera.

Votre engagement vous honore. Il vous oblige à une exemplarité sans faille. Votre autorité en dépend.

Vous incarnerez les valeurs de la société et l'autorité de la loi. Les valeurs de la République. Les valeurs du vivre ensemble. Ces valeurs, vous les porterez en accomplissant vos missions avec probité, mesure et dignité, en veillant scrupuleusement au respect des règles de déontologie.

Le respect des règles par les surveillants conditionne volonté de réinsertion des détenus. Il conforte l'image de l'administration pénitentiaire et de ses personnels. Il contribuera à la juste reconnaissance de votre engagement au service des Français.

 

Mesdames et Messieurs,

Pour faire face aux défis qui vous attendent, vous avez reçu une formation de haut niveau, sur le plan théorique comme sur le plan pratique. Je salue, Madame le Directeur, l'ensemble de l'équipe pédagogique de l'Ecole Nationale de l'Administration Pénitentiaire. Je mesure sa compétence et son professionnalisme.

Le temps de votre formation est clos. Vient maintenant le temps de la pratique

Vous entrez dans une administration pénitentiaire en pleine évolution.

Evolution des missions d'abord.

La loi pénitentiaire vous confie des responsabilités nouvelles : favoriser la prévention de la récidive, mettre en œuvre l'individualisation des peines. Au sein des services pénitentiaires d'insertion et de probation, vous participerez directement, avec les travailleurs sociaux, aux mesures d'aménagement de peines. Vous mettrez en œuvre le placement sous surveillance électronique.

Je souhaite diversifier les missions des personnels de l'administration pénitentiaire, tout en les recentrant sur leur cœur de métier. Je souhaite par exemple que la mission de garde et d'escorte, actuellement confiée au ministère de l'Intérieur, revienne au ministère de la Justice. Je veillerai naturellement à ce que nous disposions de moyens suffisants pour y parvenir.

Parallèlement, j'entends améliorer les conditions de travail des surveillants pénitentiaires, au plan matériel comme au plan humain.

Au plan matériel.

Il faut lutter contre la surpopulation carcérale qui complique voire empêche l'exercice de vos compétences.

Dans le cadre du futur plan immobilier, 5 000 places supplémentaires seront créées, comme le Président de la République l'a annoncé. En 2017 la France sera dotée de 68 000 places de prison, dont 35 000 de moins de 30 ans, pour une population carcérale qui devrait logiquement diminuer.

Le programme immobilier traduira sur le plan architectural les prescriptions de la loi pénitentiaire. L'encellulement individuel. L'application des régimes différenciés. Le développement des activités.

Je souhaite développer un nouveau concept d'établissement.

Je veux rompre avec la logique d'uniformité des établissements pénitentiaires. Il faut prendre en compte la différence des détenus, de leur profil, de leur dangerosité, de leur capacité de réinsertion.

Je veux rompre avec la logique d'inactivité. Il n'est pas acceptable que des détenus en courte peine ou manifestant une réelle volonté de réinsertion soient contraints à l'oisiveté, enfermés dans leur cellule 22 heures sur 24.

Les établissements à réinsertion active réserveront une place plus importante aux espaces d'activités. Leur configuration renforcera les liens humains entre surveillants et détenus.

Je veux améliorer vos conditions humaines de travail.

Prévenir la violence en détention est l'une de mes priorités. Je ne suis pas de ceux qui pensent que la violence exercée est un risque du métier ou une fatalité.

La loi pénitentiaire renforce la protection des personnels pénitentiaires contre les faits de violence. Les surveillants pénitentiaires bénéficient déjà d'une protection, prévue par le statut, contre les violences, voies de faits, outrages et insultes dont ils peuvent faire l'objet : prise en charge des frais d'avocat, assistance juridique lors de la procédure. J'ai tenu à ce que cette protection soit étendue aux familles. C'est l'une des avancées de la loi pénitentiaire.

Il faut aller plus loin et traiter le phénomène de la violence bien en amont.

J'ai mis en place un groupe de travail à la chancellerie. Il vient de me remettre son rapport. Celui-ci comporte des propositions visant à mieux prévenir la commission des agressions, mieux prendre en charge les victimes d'agression, adapter la chaîne de responsabilité pour réduire les tensions. J'examine actuellement ces propositions. Je vous proposerai très prochainement la mise en place de certaines d'entre elles, en fonction de leur faisabilité et de leur efficacité.

 

Avant de conclure, j'évoquerai brièvement la situation financière de l'administration pénitentiaire.

Certains ont cru opportun ou nécessaire de parler de cessation de paiements Je le regrette. Telle n'est pas la réalité et sonner le tocsin dans le vide crée de l'inquiétude mais n'a jamais été très utile.

En présentant le budget 2010 au Parlement, j'avais évoqué les contraintes de gestion qui pesaient sur le ministère. Il n'y a donc rien de nouveau à le répéter pour la pénitentiaire, comme pour les juridictions.

Notre responsabilité collective, la mienne en en tant que ministre, celle de votre directeur, est aujourd'hui d'identifier l'état des lieux et de rechercher les solutions prenant en compte les missions.

Ces solutions, nous les trouverons, quitte à vérifier le bien-fondé d'un certain nombre de pratiques. Une chose est sûre : la situation financière de l'administration pénitentiaire n'aura aucune conséquence sur le versement des salaires et des primes. J'y veillerai personnellement.

 

Madame le Directeur,

Mesdames et Messieurs,

L'administration pénitentiaire est une grande maison.

Je souhaite que chacune et chacun d'entre vous puisse y trouver sa place. Je souhaite que, rassemblés autour des valeurs qui nous unissent, nous travaillions ensemble à une société plus sûre, plus juste, plus protectrice pour nos concitoyens.

L'avenir de notre société se joue aussi dans nos prisons.

Surveillants pénitentiaires, vous êtes à l'avant-garde de ce noble combat. La sécurité de nos concitoyens dépend de votre vigilance. La pérennité de notre pacte républicain repose sur votre engagement.

Vous avez toute ma confiance. Tous mes vœux vous accompagnent.