[Archives] Déplacement à Villiers-le-Bel : Lycée Pierre Mendès France

Publié le 13 juin 2013

Discours de Christiane TAUBIRA, Garde des Sceaux, ministre de la Justice

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Pierre Mendès France est une belle et grande figure masculine. Je vous invite à vous plonger dans sa vie. J’ai passé un excellent moment, ici, dans ce bel établissement. Je suis ravie d’y avoir été accueillie. Merci à Monsieur le Recteur. Merci à Madame la Directrice de l’Académie. J’ai eu le plaisir d’avoir à mes côtés le procureur et le président du tribunal de grande instance, ainsi que le procureur général et le premier président de la Cour d’appel. J’ai apprécié leur présence. Merci à Monsieur le Maire et à tous.

Je viens de passer un moment extrêmement intense avec cet atelier d’écriture. Le travail, qu’ils ont élaboré, est d’une très grande qualité. Je suppose qu’à l’intérieur de l’établissement, il existe un partage autour de ce travail. Je me rends toujours avec un immense plaisir dans un établissement scolaire. Évidemment, je préviens le ministre de l’Éducation nationale. Vous devez comprendre que le gouvernement tout entier est soucieux de la mise à disposition et de la mise à la portée des jeunes, des savoirs, des connaissances et de tous les moyens qui permettent une émancipation de chacun. Nous souhaitons l’émancipation de chacun.

Dans ce pays, il existe des personnes, des individus, des citoyens, pas simplement des hommes et des femmes. Ce pays n’est pas simplement l’histoire de l’homme et l’émancipation de la femme. Chaque personne existe en tant que telle, et intéresse en tant que telle. Vous vous en rendez compte. Vos enseignants vous connaissent par vos prénoms. Ils connaissent votre caractère. Ils connaissent vos défauts. Vos enseignants vous traitent en tant qu’individu, et l’encadrement de l’établissement aussi.

Nous, les responsables politiques, nous regardons aussi la société avec cet esprit là. La société est faite de personnes. Nous veillons à donner toutes les chances à chacune et à chacun. Telle est la grandeur et la noblesse de l’œuvre politique. Tel est le sens du dévouement et de l’engagement politique. Nous veillons à ce que la société organise les conditions permettant à chacune et à chacun de découvrir ses propres ressources, de développer ses propres capacités, de percevoir ses propres talents, de choisir sa destinée personnelle.

Compte tenu des échanges que nous avons eus ce matin, je veux vous dire à vous, les adolescents, que vous arrivez au monde dans une famille, dans une ville, à un moment donné. Parfois, votre parcours de vie est fait de beaux événements, de belles surprises, mais aussi d’accidents de la vie. Parfois, vous rencontrez des difficultés. Sachez simplement que vous serez toujours en capacité de surmonter les difficultés. Autour de vous, il y a toujours du monde bienveillant. Ensuite, au fond de vous, vous avez la capacité de faire. Ne perdez jamais cette conviction que vous avez la capacité de faire.

Vous êtes des adolescents. Vous avez la chance d’être dans un pays qui met l’éducation gratuitement à la portée des jeunes, des enfants, des adolescents et des plus grands. Je pense aux universités et aux centres de formation. L’éducation est le plus beau capital qu’un pays puisse donner à ses citoyens, à ses ressortissants. Le plus beau capital est le savoir, l’éducation, quel que soit le métier que vous choisirez. Vous exercerez peut-être un métier manuel, un métier intellectuel, un métier artistique, un métier culturel, un métier scientifique. Dès le premier jour, vous avez été capable de recevoir. La société s’est organisée pour vous donner. La société s’est organisée parce que des générations ont travaillé. Il vous revient, à vous, de travailler pour que la société continue à être en capacité de donner à vos enfants, à vos petits-enfants, à vos arrière-petits-enfants. Telle est l’humanité. Telle est l’urbanité. Telle est la civilité. C’est le fait de vivre ensemble dans une société, de partager une langue, des cultures, des moments, de la créativité. Quel que soit le métier que vous choisirez, il sera à votre portée parce que vous aurez pu commencer, un premier jour, à aller à l’école. C’est le cadeau et le don le plus fabuleux que vous fasse la société.

Je voudrais vous quitter en vous laissant un autre cadeau. Il s’agit d’une très belle parole d’un très grand poète, qui vient d’une petite île de la Caraïbe. Il a été d’une telle intelligence et d’une telle générosité qu’il a rendu son pays immense. Il a fait connaître sa pensée, son pays et l’histoire de son pays dans le monde entier. Aimé CÉSAIRE a écrit quelques phrases dans un très bel ouvrage, qui s’intitule Cahier d’un retour au pays natal. Quel que soit le chemin que vous choisissez, quelle que soit la destinée que vous construisez, quel que soit le métier que vous exercerez, manuel ou intellectuel, quel que soit le chemin que vous tracez, vous devez être le meilleur de ce que vous êtes capable d’être. Ne cherchez pas à être le meilleur de tous. Cherchez à être le meilleur de ce que vous êtes capable d’être, quel que soit le métier que vous exercerez. Les paroles d’Aimé CÉSAIRE sont comme une prière. Elles sont les suivantes : « Donnez à mes mains puissance de modeler. Donnez à mon âme la trempe de l’épée. […] Faites de ma tête une proue […] ». Quel que soit le métier que vous aurez choisi, que vos mains aient la puissance de modeler, que votre âme ait la trempe de l’épée, que vous ayez toujours le courage quels que soient les événements de la vie, et que votre tête soit une tête de proue. Je vous remercie.