[Archives] Assemblée Générale de l'Union internationale du notariat

Publié le 13 novembre 2009

Discours de Michèle Alliot-Marie, ministre d'Etat, garde des sceaux, ministre de la justice et des libertés

Temps de lecture :

5 minutes

Monsieur le Président,

Mesdames et Messieurs,

 

Mes premiers mots iront à ceux d'entre vous qui sont venus de loin pour assister, ici à Paris, à l'assemblée de l'Union internationale du notariat. La France est heureuse et fière de vous recevoir. Soyez les bienvenus.

 

 

Mesdames et Messieurs,

 

La dimension internationale du notariat a longtemps été jugée secondaire. Elle est aujourd'hui incontournable. L'européanisation du droit et des procédures modifie les pratiques professionnelles. La concurrence des traditions juridiques creuse les divergences entre les pays de common law, où le notaire n'existe pas, et les pays de droit romain, où le notaire est un pilier de l'organisation judiciaire.

 

 

Mesdames et Messieurs,

 

Pour le notariat, la mondialisation est un défi. C'est aussi une formidable opportunité. Je l'affirme avec conviction : le notariat est plus que jamais en phase avec les défis du XXIe siècle.

 

Le besoin de sécurité juridique est une réalité face à la montée des contentieux et des risques juridiques, à la profusion des normes, à leur complexification. L'authentification des actes, compétence exclusive des notaires, y répond directement.

 

L'accessibilité du droit est une demande des citoyens, des entreprises, des collectivités. En tous points du territoire, les notaires assurent un service public de proximité, à l'écoute de chacun.

 

 

Mesdames et Messieurs,

 

Le temps est venu de donner au notariat toute la visibilité internationale qu'il mérite. C'est une nécessité pour la modernisation de la profession. C'est une exigence pour la diffusion et le rayonnement de notre modèle juridique.

 

Votre association a eu le courage d'être pionnière en ce domaine. Votre combat est le mien.

 

Oui, il faut dépasser les réflexes nationaux. Il faut rejeter la tentation de l'immobilisme et du repli sur soi.

 

C'est le sens de la politique que je mène au plan national. C'est l'enjeu de mon engagement au plan international.

 

 

***

 

 

Donner aux notaires les moyens concrets d'affronter les défis de la modernité, c'est une responsabilité des Etats et de la profession.

 

Les notaires doivent s'adapter, se moderniser, se remettre en question. Trois objectifs guident mon action.

 

Premier objectif, favoriser le décloisonnement entre les professions du droit.

 

Favoriser une communauté cohérente de juristes peut renforcer la lisibilité et l'accessibilité du droit pour les citoyens et les entreprises. Il ne s'agit pas de fusionner les professions mais, chacune ayant son identité, de favoriser le travail en commun.

 

L'interprofessionnalité est le gage d'une offre de services plus globale et plus compétitive, dans le respect des compétences de chacun.

 

- La solidarité des professions du droit peut s'exprimer sur le plan financier. Je souhaite ouvrir le capital des sociétés de notaires aux autres professions du droit.

 

- L'interprofessionnalité peut aussi se traduire par des formations communes à l'ensemble des juristes. Je souhaite y réfléchir avec les professionnels.

 

Deuxième objectif, développer les nouvelles technologies. C'est un gain d'efficacité et de performance au service des justiciables.

 

Depuis 10 ans, beaucoup a été fait. La signature électronique se développe. Des actes notariés sont établis à distance. Des actes authentiques sont établis sur support électronique, avec la même valeur juridique que des actes établis sur support papier.

 

Avec les notaires, je veux étudier les voies et moyens de poursuivre l'effort engagé.

 

Troisième objectif, adapter la formation des notaires.

 

Face aux mutations du droit, de la société, des technologies, maintenir le niveau de savoir-faire et d'expertise du notariat suppose une formation adaptée tout au long de la carrière.

 

La formation continue doit être obligatoire. En France, l'obligation sera bientôt inscrite dans la loi.

 

La formation continue doit être s'ouvrir à l'international. Le Conseil des Notariats de l'Union Européenne y contribue activement. Je tiens à le saluer.

 

 

***

 

 

Plus forte dans chacun de nos pays, la profession de notaire doit aujourd'hui s'ouvrir à l'international.

 

Le notariat latin est présent dans 19 des Etats membres de l'Union Européenne. De nombreux pays étrangers s'en inspirent ou le prennent pour modèle.

 

Ouvrir le notariat à l'international, c'est promouvoir la culture de la sécurité juridique à l'échelle européenne et mondiale.

 

Je veux encourager une stratégie active de développement international du notariat, fondée sur de nouveaux instruments juridiques et de nouveaux modes de coopération entre les professionnels.

 

Des instruments juridiques renouvelés.

 

Aujourd'hui, la portée de l'acte authentique est réduite à l'espace national. Pourtant, en raison de la mobilité accrue des citoyens et des entreprises, la demande d'actes authentiques dépasse les frontières.

 

Au sein de l'Union européenne, la reconnaissance mutuelle des actes authentiques est une nécessité. Pourquoi ne pas aller jusqu'à un acte authentique européen ?

 

Etabli dans un Etat membre de l'Union Européenne, il se verrait accorder partout en Europe la valeur qu'attache à son contenu l'Etat dont il émane.

 

Plus généralement, en matière de successions, de testaments et de régimes matrimoniaux, des instruments communautaires nouveaux permettront aux justiciables de mieux faire face aux situations nouvelles liées à la mobilité des populations.

 

Il faut aussi inventer de nouveaux modes de coopération entre les professionnels.

 

Au plan européen, les notaires doivent prendre toute leur place au sein de l'Europe de la justice civile.

 

En 2010, le Réseau judiciaire européen en matière civile et commerciale s'ouvrira à la profession notariale. C'est aussi une avancée de la présidence française de l'Union Européenne.

 

Ce réseau unit les magistrats des Etats membres. Il s'enrichira des apports des autres professions qui concourent à la mise en œuvre du droit communautaire. Il offrira aux notaires un cadre d'échanges internationaux pour confronter leurs approches et mutualiser leurs pratiques.

 

La promotion du notariat doit aller au-delà du cadre communautaire.

 

C'est, je le sais, l'un des volets de votre activité. C'est aussi le but de la fondation pour le droit continental, pour laquelle le notariat français s'est beaucoup investi.

 

Grâce aux initiatives souvent ponctuelles, des contacts sont établis en Asie, notamment en Chine et au Vietnam, mais aussi au Maroc pour renforcer la coopération entre professionnels.

 

 

Mesdames et Messieurs,

 

Le rayonnement de nos systèmes juridiques est l'affaire de tous les professionnels du droit.

 

Nous avons des atouts. Faisons-les valoir ensemble.

 

Nous avons des compétences et des savoir-faire. Faisons-les connaître au monde.

 

« Ce n'est pas parce que nous avons peur que nous n'osons pas, c'est parce que nous n'osons pas que nous avons peur », écrivait Sénèque.

 

Audace, excellence, ouverture : telles sont à mes yeux les trois conditions fondamentales de l'avenir du notariat.

 

Je vous souhaite d'excellents travaux.

 

Retour à la rubrique