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L’affaire Dandonneau : escroquerie criminelle à l’assurance-vie

Publié le 07 août 2020 - Mis à jour le 02 mars 2023

A la fin des années 1980, Yves Dandonneau a un rêve : fonder une école pour les enfants victimes de violences familiales, violences qu’il a lui-même subies. Il est prêt à tout pour mener à bien son projet et obtenir l’argent nécessaire, quitte à tuer un homme innocent en le faisant passer pour lui, et toucher ainsi sa propre assurance-vie.

Visuel procès historiques ©DR
Visuel procès historiques

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Le crime presque parfait

Dans la nuit du 6 au 7 juin 1987, Daniel Blouard est victime d’un accident de voiture sur une petite route sinueuse de l’Hérault. Il s’en sort indemne mais pas son ami Yves Dandonneau, passager de la voiture. Les pompiers arrivent trop tard : la voiture est en flammes, et le corps du passager calciné.

Ce corps est en fait celui de Joël Hipeau, un homme brillant au destin brisé, devenu sans domicile fixe. Cette victime idéale pour l’escroquerie a été trouvée par François Meunier, ami d’Yves Dandonneau à qui il a promis un poste dans sa future école.

Dandonneau et Blouard ont approché le malheureux, lui ont fait boire de l’alcool et fait monté dans une voiture qu’ils ont précipitée contre un rocher. Une fois la voiture aspergée d’essence et incendiée, le crime parfait était réglé.

Marie-Thérèse Héraut, la compagne d’Yves Dandonneau, et Danielle Simonin, sa secrétaire (et maîtresse) sont convoquées pour reconnaître le corps du défunt, ce qu’elles font. Son compagnon ayant contracté des assurances-vie auprès de huit compagnies différentes, Marie-Thérèse Héraut s’attend à recevoir près de 12 millions de francs (soit 1 800 000€). Mais l’une des compagnies d’assurance, britannique, est suspicieuse.

Les enquêtes des assureurs

Cette compagnie établit qu’Yves Dandonneau l’a contacté directement pour établir un contrat limité au risque de décès accidentel, avec triplement de la garantie en cas d’accident de la circulation. Jean Porcer, détective privé de la région montpelliéraine, est engagé par la compagnie d’assurance pour enquêter sur l’accident.

Sa conclusion est claire : trop d’éléments laissent à penser que l’accident n’en est pas un. La voiture roulait à une vitesse basse, le chauffeur a percuté le seul obstacle existant sur cette route, et la voiture a entièrement brûlé.

Une des compagnies d’assurance françaises mandate également un enquêteur de la cellule anti-fraude (ALFA), relevant de la Fédération Professionnelle des Assureurs, et parvient aux mêmes conclusions : aucune trace de freinage n’est détectée, et une autre route beaucoup plus praticable existe pour le même trajet.

La procédure judiciaire est enclenchée

Le rapport de l’ALFA débouche sur une plainte déposée le 12 août 1987 auprès du tribunal de grande instance de Montpellier. Claudine Laporte, juge d’instruction, ouvre une commission rogatoire et charge le commandant Albert Malé de reprendre l’enquête.

Un ingénieur du CARME, laboratoire privé de la police, parvient à extraire quelques grammes d’os présents dans la voiture calcinée, et reconstitue une mâchoire, à laquelle il manque deux dents de sagesse : ce n’est pas celle d’Yves Dandonneau.

En parallèle, cinq des huit compagnies d’assurance ont versé l’argent attendu à Marie-Thérèse Héraut, les trois autres attendant les résultats de l’enquête de gendarmerie.

Deux jours après l’ouverture de l’enquête à Montpellier, la compagne « veuve » d’Yves Dandonneau, accompagnée de Danielle Simonin et de son mari, se rend dans une poste du 15ème arrondissement de Paris pour retirer en espèces 2,4 millions de francs. Devant ce retrait conséquent, la poste contacte la police, qui les place en garde à vue. Les suspects sont relâchés, mais Claudine Laporte autorise leur mise sur écoute.

Yves Dandonneau est rapidement localisé dans une villa près de Cannes. Le 15 janvier 1988, les gendarmes l’arrêtent. Malgré un changement d’identité et de visage grâce à la chirurgie esthétique, il avoue rapidement son crime, et dénonce ses complices restés en Ile-de-France et  aussitôt mis sous verrous.

Le procès de l’affaire Dandonneau s’ouvre le 30 juin 1992 devant la Cour d’assises de Montpellier. Il est renvoyé au 12 octobre de la même année après que le president de la Cour eut donné une interview dans la presse locale sur l'affaire.

Le verdict du procès tombe le 16 octobre 1992 : Yves Dandonneau est condamné à 20 ans de réclusion criminelle. Daniel Blouard, qui conduisait la voiture, à 14 ans de réclusion criminelle. François Meunier, qui a trouvé la victime idéale, écope de 9 ans de prison. Sa compagne et sa maitresse sont condamnées à 4 ans de prison avec sursis pour complicité d’escroquerie.

Clémentine Teixeira
IFP/Master 2