Visite historique : de l'Ancien Régime au Premier Empire
L'Ancien Régime (du XVIe au XVIIIe siècle) - La Révolution française (1789-1795) - Le Premier Empire (1795-1815) - Le XIXe siècle - Les bagnes (1748-1938) - Le XXe siècle
L'Ancien Régime (du XVIe au XVIIIe siècle)
L'histoire de l'enfermement commence en France au XVIe siècle lorsque François Ier décide d'enfermer les pauvres "marauds, vagabonds, incorrigibles, belistres, ruffians, caymans et caymandeuses" dans depetites maisons. Dès le milieu du XVIe siècle sont également ouvertes, en Angleterre et aux Pays-Bas, des maisons de correction où l'on enferme, pour les corriger et les mettre au travail, vagabonds et petits délinquants.
Louis XIV, en 1656, crée l'hôpital général, pour rassembler les vieillards, les enfants orphelins et les malades. Des "quartiers de force" sont ouverts pour enfermer les femmes condamnées qui ne peuvent être envoyées aux galères et les pauvres délinquants.
En août 1670, une ordonnance criminelle énumère quelques pénalités de l'ancien droit : amendes, blâme, châtiments corporels (essentiellement le fouet), bannissement, galères et mort. La prison reste un lieu de sûreté sans être une peine. Cependant, dans toute l'Europe, les institutions d'enfermement et de mise au travail des pauvres se multiplient.
 |
25 juillet 1700 : Règlement royal contre la mendicité |
 |
Le vieux château de Bicêtre. |
 |
Gravure de Mariette, vers 1750. Prisonnier enchaîné. Gravure de Chauveau, XVIIIe s. |
À la veille de la Révolution existent plusieurs types d'institutions d'enfermement :des lieux de sûreté sont aménagés dans une salle de la porte d'une ville, un cachot sous le palais de justice, ou dans un bâtiment plus important.les prisons ordinaires, ancêtres des maisons d'arrêt, accueillent des populations très hétérogènes de prévenus, accusés, petits condamnés, mineurs, dettiers, prostituées, galériens attendant le passage de la chaîne, etc.les maisons de force, prisons d'Etat. La plupart est composée de forteresses militaires, où sont enfermés sur ordre du roi, par lettre de cachet, les espions, les traitres, les prisonniers politiques et les prisonniers d'opinion. À partir du règne de Louis XIV, ces prisons d'Etat se multiplient, souvent gérées par un ordre religieux. Les plus célèbres sont la Bastille, Vincennes, le château d'If ou Belle-Île-en-Mer. Les prisonniers pauvres, les pailleux, qui ne sont pas assistés par leur famille, sont regroupés dans le quartier du Commun, dormant sur la paille, nourris par la charité chrétienne puis par le Pain du roi à la fin du XVIIIe siècle. Les plus riches sont à la pistole, logés et nourris à leurs frais dans des chambres meublées.les dépôts de mendicité créés en 1764, véritables ateliers où les mendiants sont mis au travail forcé, première institution d'État où l'intendant paie un prix de journée à un entrepreneur pour l'entretien des prisonniers.
 |
Arrêt de la cour du Parlement du 1er février 1785. |
Les créanciers sont tenus de verser 12 livres par mois pour la nourriture des prisonniers qu'ils font arrêter.
 |
Mirabeau, Des lettres de cachet et des prisons d'État, 1778. |
Les philosophes du Siècle des Lumières s'attachent à réduire les pratiques de la justice d'Ancien Régime qu'ils jugent afflictive, inégalitaire et arbitraire. Les peines corporelles constituent l'essentiel du châtiment.
 |
Supplice de la roue, XVIIIes. |
 |
Supplice du carcan, XVIIIes. |
Le condamné pour banqueroute frauduleuse est attaché par un collier de fer à un poteau pour être exposé au public.
 |
Arrêt de la cour contre le régicide Damiens, 1767. |
Soldat puis domestique, Robert-François Damiens frappa le roi Louis XV d'un inoffensif coup de canif. Il fut écartelé en place de Grève, et son supplice créa un scandale durable.
 |
Portrait de Beccaria, (1738-1794) Gravure de Bosio, v. 1785. |
Dans son ouvrage Des délits et des peines, paru en 1764, le marquis Cesare Beccaria, ami de Voltaire et Diderot, dénonce les lois injustes, prône le principe d'égalité devant les lois, demande une correspondance entre les sanctions et les crimes et réclame des peines sûres mais douces. Il s'oppose aux châtiments corporels et aux supplices, non seulement parce qu'ils sont cruels, mais aussi parce qu'ils sont inutiles sur le plan de la prévention. La peine la plus efficace est la plus spectaculaire et la moins cruelle. La peine d'emprisonnement peut remplir ces conditions.
La Révolution française marque le véritable point de départ du système pénitentiaire contemporain.La liberté est proclamée comme valeur suprême par la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789. Les peines corporelles sont en partie supprimées ; on leur substitue la peine privative de liberté, mais la peine de mort et les travaux forcés continuent d'occuper les plus hauts degrés de l'échelle des peines.
Le Code pénal de 1791 prévoit les peines suivantes :la mort (tout condamné à mort aura la tête tranchée) ;les fers (travaux forcés) ;l'emprisonnement avec isolement absolu ;la déportation ;le carcan (collier de fer).Des maisons d'arrêt, de justice et de correction sont créées auprès de chaque tribunal, pour accueillir les prévenus (maisons d'arrêts), les accusés (maisons de justice) et les condamnés à l'emprisonnement correctionnel de moins d'un an (maisons de correction).Des maisons de force et de correction sont prévues par l'Assemblée Constituante, elles ne fonctionneront véritablement que pendant l'Empire.
 |
Déclaration des droits de l'homme 1789. |
 |
Code pénal, 6 octobre 1791. |
 |
Loi d'instruction criminelle, 1791 qui porte création des maisons d'arrêt auprès des tribunaux. |
 |
Jugement contre Louis XVI. Après la journée révolutionnaire du 10 août 1792, le roi Louis XVI est enfermé au Temple. Jugé à partir du 3 décembre, il est guillotiné le 21 janvier 1793. |
 |
Guillotine. Almanach des prisons. 1792. |
Les prisons sont rattachées au ministère de l'Intérieur par la loi du 10 Vendémiaire an IV (2 octobre 1795) et placées sous le contrôle des préfets. Mais l'autorité judiciaire reste seule investie des décisions pénales.
Les codes napoléoniens renforcent la répression, reprennent les châtiments physiques du boulet au pied du forçat et la flétrissure au fer rouge sur l'épaule.A partir de 1803, des maisons centrales (par rapport à une circonscription militaire) sont ouvertes sur tout le territoire national. Installées dans les anciens biens nationaux, abbayes, séminaires ou citadelles, ces maisons centrales accueillent les condamnés à l'emprisonnement correctionnel de plus d'un an, les condamnés à la réclusion criminelle et les femmes condamnées aux travaux forcés.
Les prisons d'Embrun, Clairvaux, Fontevrault, le Mont-Saint-Michel, Loos, Poissy, Melun, Nîmes, Riom, Cadillac, Belle-Île, Doullens... sont successivement ouvertes pendant les premières années du XIXe siècle. Elles sont organisées autour d'immenses ateliers, où des milliers de détenus sont surveillés par une petite centaine de gardiens avec l'aide de la troupe chargée de la garde extérieure.
 |
Maison centrale de Clairvaux. Vue du cloître. |
 |
Plan de la maison centrale de Melun. Vue cavalière. |
 |
Maison centrale de Loos-les-Lille. Vue cavalière. |