« Chancellerie », « garde des Sceaux » : aux origines des mots
L'évolution du vocabulaire de la Justice à travers l'Histoire
Les termes « la Chancellerie », « le garde des Sceaux », désignent le ministère de la Justice et le ministre qui lui est rattaché. Ces expressions sont entrées dans le langage courant, mais que sait-on de leur étymologie, de leur sens premier et de l'histoire de ces termes séculaires ?
La fonction de chancelier est aussi vieille que l’Empire romain, même si elle n’en a pas toujours porté le nom officiel. Protégés par un cancelli (un treillis, une barrière) les greffiers élaborent les lois, préparent le droit en vigueur au Bas-Empire romain, s'entourant d'un grand secret pour marquer la solennité de leur charge. Puis la pratique se perpétue tout au long du Moyen-Âge, où clercs et notaires du roi ont pour tâche d'authentifier ses écrits, de signer pour lui les chartes qui attestent le droit et la Justice du royaume ainsi qu'il les a décidés. On peut aussi rapprocher l'origine de « chancellerie » du verbe cancellare, qui signifie annuler, fermer. Cette filiation du terme, plus marginale, fait référence à l'apposition d'une marque sur un document officiel, dans une logique d'annulation.
Sous l'Ancien Régime (XVIe - XVIIIe), est créé l'office de Chancelier de France - également désigné par le terme de « cancellariat ». Celui qui l'occupe est chargé de l'administration de la Justice et commande tous les secrétaires et notaires du roi. Cette fonction haut-placée en fait le premier officier de la couronne. Initialement issus du clergé –l'ordre le plus au fait des questions de droit– les chanceliers sont peu à peu choisis parmi les laïcs, formés au droit dans les facultés qui fleurissent en France à mesure que se développe la législation.
Détenteur d'un large pouvoir législatif, le Chancelier de France propose les lois, les fait rédiger et s'assure ensuite de leur respect. Il est assisté d'un garde des Sceaux (d'abord garde du Sceau ou du Scel) chargé d'apposer la marque du roi sur les écrits et les chartes. En cas de vacance de la chancellerie - pour désaccord avec le roi, trahison ou décès - le gardien du sceau remplit les fonctions de son collègue. L'authentification des écrits royaux par un cachet, un sceau, un signe particulier, est pratiquée très tôt. On retrouve dès les Carolingiens des traces de monogrammes attestant les textes officiels, eux-mêmes certifiés par des signatures et appositions de figures diverses. Mais, plusieurs millénaires avant notre ère, le sceau est déjà employé, pour authentifier des écrits ou pour fermer des jarres, des paniers...
Le Sceau de la République
Aujourd'hui, les services centraux du ministère de la Justice et des Libertés sont surnommés « Chancellerie », en référence à l'ancien office de Chancelier de France. Le ministère est en effet appelé Chancellerie selon un usage qui perdure alors que le ministre n'est plus « chancelier », même s'il en conserve la plupart des attributions.
En revanche, la mention « garde des Sceaux » précède celle de ministre en toutes circonstances car il assure encore cette fonction : le garde appose le Sceau de France sur les révisions constitutionnelles et les lois les plus importantes pour en marquer la solennité. A cette occasion, le directeur des Affaires civiles et du Sceau requiert « qu'il plaise au ministre de bien vouloir apposer le Grand Sceau de la République française. »
Ne pas confondre « Chancellerie » et « chancelleries »
Les ambassadeurs et leur équipe de conseillers et de secrétaires en poste à l'étranger constituent une entité appelée « chancellerie ». Dans ce sens, elle désigne l'ambassade. Cette mission diplomatique est chargée de représenter la France et ses intérêts à l'étranger, de favoriser ses relations avec le pays dans lequel elle est implantée.