Des cinés, la vie ! 2012
Une journée sous le signe du septième art
Décerné par un jury de jeunes sous mandat judiciaire, le trophée « Des cinés, la vie ! » 2012 a été remis à Olivier Broudeur et Anthony Quere pour leur court métrage « Dounouia, la vie ».

La Cinémathèque française à Paris a accueilli le 30 mars dernier la remise du prix « Des cinés, la vie ! ». Sur place, 183 jeunes accompagnés d'une centaine de professionnels de la Protection judiciaire de la jeunesse (PJJ) et représentant 66 structures judiciaires. Grâce au réseau Passeurs d'images, les jeunes jurés ont pu, tout au long de l'année, visionner en salles une sélection de douze courts métrages sur le thème de la foule, avant d'en débattre au sein des structures et de voter pour leur film favori. Cette année, plus de 600 mineurs pris en charge dans 190 structures différentes ont participé à l'opération.
Organisé par le ministère de la Justice et des Libertés, l'association Kyrnéa international, le Centre national de la Cinématographie, le ministère de la Culture et de la Communication et l'Agence nationale pour la Cohésion sociale et l'Égalité des Chances, cet événement d'ampleur nationale vise à sensibiliser à l'image les mineurs placés sous mandat judiciaire.
« Faire vivre une journée de cinéma »
Les conférenciers du service pédagogique de la Cinémathèque ont décrypté avec les jeunes une série d'extraits de films : un film muet de King Vidor, La Foule (1928), dans lequel le héros cherchant à se distinguer de la masse finit par s'y fondre, Furie (1936) de Fritz Lang, et Vers sa destinée (1939) de John Ford, présentant tous deux une foule en délire s'apprêtant à lyncher un homme.
La sélection n'aurait pas été complète sans le visionnage de deux extraits de films de Tim Burton, qui fait actuellement l'objet d'une exposition à la Cinémathèque : Batman (1989) et Mars Attacks ! (1996) ont permis d'aborder la question de la foule lors de rassemblements politiques.
Une sélection ambitieuse et de qualité, comme chaque année, déroutante dans un premier temps pour les mineurs mais qui a su faire émerger des observations et des remarques tout à fait justes. Preuve que le cinéma constitue un support éducatif pertinent pour susciter la réflexion, la critique et l'analyse, à partir de films que ce public n'a pas l'habitude de voir.

« Comprendre les images »
Deux jeunes pris en charge par la PJJ et créateurs du trophée 2012 (voir encadré) sont montés sur scène, le ventre un peu noué, pour décerner le trophée : « Et le prix "Des cinés, la vie !" 2012 est attribué à Olivier Broudeur et Anthony Quere pour Dounouia, la vie ! ». Très touché par ce prix, le premier de sa carrière, Olivier Broudeur a regretté que la diffusion de courts métrages soit si confidentielle alors que « le court métrage est fait pour des jeunes qui sont peut-être plus touchés par ce que vit Modibo [le héros du film, ndlr] ».
Le ministère de la Culture et de la Communication a rappelé la nécessité « pour une génération qui voit beaucoup d'écrans, de comprendre comment c'est construit, instrumentalisé parfois », et l'importance de conquérir « les nouveaux acteurs pour la culture que sont les jeunes ». La directrice générale déléguée du CNC a appuyé ses propos : « le cinéma est ce qui nous permet d'avancer à des moments importants de la vie ».
Un trophée imaginé et créé par les jeunesLe trophée a été réalisé par deux jeunes pris en charge par la PJJ. Ils ont passé une semaine à travailler sur la réalisation de la statue qui devait correspondre à un cahier des charges très précis : taille, poids, transportabilité... Travaillé au chalumeau, un parallélépipède de plastique a été coloré avec des bombes or, argent et noir créant un effet cuivre, similaire à celui de la récompense des Césars. La structure a été fixée sur une vieille bobine de film et enrubannée d'une pellicule représentant des mains menottées : « Il fallait que le trophée raconte quelque chose tout en étant en lien avec la manifestation : les images de mains menottées ne sont pas anodines pour les jeunes que nous suivons, elles portent un message plein de sens », explique l'instituteur. « La réalisation du trophée comportait également plusieurs enjeux : tout d'abord, rendre les jeunes fiers de ce qu'ils sont capables de faire. Concevoir une récompense qui sera remise au réalisateur gagnant devant les autres jeunes PJJ participant à la manifestation n'est pas rien ! Le deuxième enjeu concerne la sécurité puisque le trophée a été réalisé en fondant le polystyrène au chalumeau. Il faut donc rester très vigilant mais en même temps savoir faire confiance aux deux mineurs. Enfin, l'utilisation de vieilles bobines de film a permis de parler de la « permanence rétinienne ». Les jeunes me disaient « Mais ? C'est toujours la même image qu'on voit ! ». |